Traitement par laser endoveineux écho-guidé de malformations veineuses extra tronculaires: résultats à moyen terme.

Titre original : 
Ultrasound-guided intralesional diode laser treatment of congenital extratruncular venous malformations: mid-term results.
Titre en français : 
Traitement par laser endoveineux écho-guidé de malformations veineuses extra tronculaires: résultats à moyen terme.
Auteurs : 
Liu G, Liu X, Li W, Shi H, Ye K, Yin M, Huang Y, Lu X, Huang X, Lu M, Jiang M.
Revue : 
Eur J Vasc Endovasc Surg. 2014 May;47(5):558-64.

Traductions & commentaires : 
Monira NOU HOWALDT pour le groupe de travail des malformations vasculaires de la SFMV.



INTRODUCTION :

Les malformations veineuses représentent 2/3 des malformations congénitales et on distingue les formes tronculaires des formes extra tronculaires (classification de Hambourg). Les malformations veineuses extra tronculaires (MVE) croissent proportionnellement avec le patient avec des périodes plus à risques (adolescence, grossesse, traumatisme, chirurgie). Les formes tronculaires ont une capacité de croissance et de prolifération plus importantes et sont plus difficiles à traiter.

Les MVE se compliquent souvent d’œdème, de thrombose, d’anomalie osseuse, de coagulopathie (CIVL). La résection chirurgicale est le seul traitement radical mais implique de nombreuses complications (saignement, lésion neurologique, impotence fonctionnelle, cicatrices) et les résections incomplètes sont à haut risque de récurrence. La sclérothérapie, n’est pas toujours optimale à cause des difficultés de contrôle des dosages et de l’irrégularité des vaisseaux. Le risque de complications ou de recanalisation sont de l’ordre de 1 à 15%.

Dans cette étude rétrospective, 164 cas de patients traités par LEV ont été étudiés (86 femmes et 78 hommes) entre mai 2007 et février 2013.

 

MATERIELS ET METHODES :

Population étudiée

Les auteurs ont réalisé une étude rétrospective. Les critères d’inclusions sont : une lésion visible en écho-Doppler, des lésions localisées ou multifocales pour lesquelles le patient ne veut pas de chirurgie, l’absence d’amélioration après un traitement conservateur, l’altération de la qualité de vie (œdème, douleur, autres symptômes). Les critères d’exclusion sont : un taux de fibrinogène <1g/l, une intolérance à l’anesthésie, une ou des lésions non visibles en échographie.

Bilan pré thérapeutique

Une IRM est systématiquement réalisée. Seules les lésions accessibles à l’écho-Doppler sont traitées et les patients ont bénéficié d’une anesthésie générale ou loco-régionale.

Technique de laser

Pour les formes localisées, traitement en 1 temps et pour les formes diffuses, traitements des zones accessibles les plus gênantes pour le patient.

La sonde laser est introduite via un cathéter de 16G ou 18G ou via un introducteur de 13F. La sonde laser utilisée avait une longueur d’onde de 810nm pour pouvoir cibler les molécules d’H2O contenues dans la paroi des veines. La puissance délivrée était comprise entre 10 et 13W. L’apparition de microbulles et de vapeur d’eau signent l’efficacité du traitement. Durant la procédure, une compression manuelle permet d’augmenter le contact entre la sonde Laser et l’endothélium. De multiples points d’introduction ont été réalisés. La puissance délivrée, la durée du pulse et le nombre de pulses ont été colligés. Une compression élastique a ensuite été appliquée par bandage pendant 5 jours puis par orthèse de compression de classe 3 pendant 1 mois quand cela était possible.

Suivi post procédure

Un pansement compressif est mis en place pendant 2 jours et la marche est encouragée. Les patients sont hospitalisés pendant 4 à 6 jours et sortent avec une ordonnance d’antalgiques pour la douleur.  Les contrôles Doppler sont réalisés à J15, M3, M6 et M12 puis annuellement. Une IRM est faite 2 semaines après le LEV.

L’efficacité clinique est définie par  une disparition ou une diminution  des symptômes ou par une réduction de la taille, de l’œdème ou une amélioration des mouvements et des amplitudes articulaires.

Les effets indésirables mineurs étaient définis par des complications ne nécessitant pas de traitement. Les effets indésirables majeurs étaient définis par des complications nécessitant une prise en charge thérapeutique ou par des séquelles irréversibles.

Les résultats sont jugés « excellents »  en cas d’occlusion complète, en cas d’occlusion partielle avec persistance de veine de drainage, les résultats étaient jugés « bons » et la réduction de calibre mais avec persistance d’un flux veineux est jugé « acceptable».

 

RESULTATS :

Cent soixante-quatre patients ont été inclus, dont 86 femmes (53%) et 78 hommes (46%) d’âge compris entre 18 mois et 68 ans.

Retour à la marche à J1, aux actes de la vie courante à J3 et au travail entre J10 et J14.

Durée de procédure entre 30 et 100 minutes (moyenne 45 minutes).

Une bonne tolérance a été constatée dans 100% des cas. Tous les patients sauf 1 ont remarqué une diminution significative de leurs symptômes entre 2 semaines et 24 mois après le traitement. Seul un patient avec une atteinte au niveau des doigts a remarqué une amélioration très légère des douleurs et a bénéficié d’une seconde procédure. Après un suivi de 24 mois, aucun patient n’a présenté de douleur, d’hémorragie ou de limitation articulaire par contre, 2 ont présenté une récidive de gêne, 2 une récidive des douleurs et 1 des problèmes de déformation.

En termes d’efficacité, 65.71% ont remarqué une diminution de l’œdème, 68.97% une amélioration de l’aspect esthétique, 97.74% une diminution des douleurs.

Après contrôle échographique, 59% ont obtenu une réponse « excellente », 31% une « bonne » réponse et 10%  une réponse « acceptable ».

 

COMPLICATIONS

En termes de complications, 11.58% ont présenté une ecchymose ou une pigmentation transitoire sur la zone traitée. Un enfant a présenté un dommage neurologique et avec trouble moteur et sensitif pendant 6 mois. Dix-neuf patients ont pris des antalgiques dans les 2 premières semaines qui ont suivi ; 5% ont présenté des indurations (résolutives en 3 à 6 semaines)  et 1 une brûlure cutanée. Quinze patients ont présenté des paresthésies transitoires résolutives en 1 à 2 mois.

 

DISCUSSION

Jusqu’ici, les études ont suggéré que le LEV était un traitement efficace des MVE avec peu d’effets indésirables. Néanmoins, les séries de cas sont de faible échantillon et les études sont menées sur le court terme.

Dans cette étude, le LEV a démontré son efficacité avec une réduction des douleurs dans 97.74% des cas et une réduction de l’œdème dans 65.71% des cas et sont comparables aux données de la littérature.  La réponse au traitement dépend de la taille de la MVE et de l’atteinte musculaire. Les résultats ont été meilleurs pour les MVE limitées, de petite ou moyenne taille. Les formes étendues  avec atteinte intra musculaire n’ont pas totalement pu être contrôlées. 

Les auteurs évoquent une anomalie de différenciation des cellules endothéliales impliquée dans les MVE. Ainsi, selon eux, il faut parvenir à détruire ces cellules et ils se basent sur l’hypothèse de Proebstle (1). Ce dernier a décrit un  phénomène de turbulence des bulles formées au cours de l’application d’énergie par laser. Il a observé que la vapeur d’eau générée par le laser endommageait l’endothélium de la veine et entraînait une occlusion du vaisseau.  Toujours selon les auteurs, le second mécanisme impliqué serait l’action du laser par contact direct avec  la paroi veineuse entrainant des déformations de paroi, des dommages tissulaires et une carbonisation. Ainsi, pour juger de la bonne énergie délivrée, les auteurs se sont basés sur l’apparition de vapeur d’eau dans le vaisseau. Au cours de la procédure. Les auteurs ont déclaré choisir une puissance comprise entre 10 et 13 Watts avec un choix de puissance fonction de la taille du vaisseau. Les auteurs ont également appliqué une compression en post procédure.

Les auteurs reconnaissent que l’effet obtenu n’était pas toujours optimal en ce qui concerne la déformation (31.34%) et l’œdème (34.36%). Dans ces cas, des traitements complémentaires par chirurgie ou sclérothérapie étaient proposés. Dans certaines formes avec de nombreux phlébolithes, une combinaison de chirurgie et de LEV était proposée ; d’autres patients nécessitaient plusieurs séances de laser. Néanmoins, en cas d’atteinte intra musculaire importante il n’était pas recommandé de répéter la procédure sous peine de générer une fibrose musculaire.

Pour les patients ayant présenté une récidive des douleurs, les auteurs évoquent une capacité de régénérations des cellules endothéliales rémanentes.

Les auteurs soulignent la courte durée de suivi des patients et la possibilité d’avoir recours à la chirurgie ou à la sclérothérapie en cas d’échec.

La possibilité d’un guidage échographique rend la technique sûre, efficace et un monitoring tout le long de la procédure. Néanmoins, les auteurs reconnaissant que l’écho-Doppler n’est pas l’examen gold standard en post procédure, mais est facilement accessible et permet de voir une réduction du flux sanguin dans la MVE. Ils mettent en garde sur la proximité des nerfs.

 

CONCLUSION

Les auteurs concluent à une efficacité du LEV dans certaines formes de MVE avec atteinte extra tronculaire.  Des études prospectives incluant un mode de distribution standardisée, des photographies et des images de suivi seront utiles pour définir la place du LEV dans les MVE.

 

COMMENTAIRES :

La puissance délivrée était fonction du calibre des vaisseaux mais les auteurs n’ont pas donnés plus de précision sur le mode de choix. Ils ne se basent que sur l’apparition de vapeur d’eau dans le vaisseau au cours de la procédure comme critère de choix.

Les auteurs n’ont pas précisé comment ils géraient les problèmes de CIVL ou CIVD en pré et post procédures LEV. Or, de plus en plus d’études ont démontré la présence de coagulopathies en cas de MV.

Le type de compression, la pression appliquée et la durée de la compression ne sont pas détaillés.

Les lasers utilisés en France ont des longueurs d’onde différentes comprises en 980nm et 1470nm versus 870nm dans cet article.

Une étude de LEV versus sclérothérapie (actuel gold standard dans le traitement des MV) serait intéressante et bien évidement, une étude prospective randomisée multicentrique permettrait de mieux définir la place du LEV dans les MV.

 

Référence

  1. Proebstle, T.M., Sandhofer, M., Kargl, A., Gül, D., Rother, W., Knop, J. et al, Thermal damage of the inner vein wall during endovenous laser treatment: key role of energy absorption by intravascular blood. Dermatol Surg. 2002;28:596–600.